Sens & Tonka
LE GÂTISME VOLONTAIRE
Comment notre société, qui n’a jamais été autant scolarisée, peut-elle paraître aussi bête? Pourquoi l’étalage de la souffrance et de la compassion est-il devenu le principal motif d’exaltation et de surenchère dans la vie politique, sociale ou culturelle? Pourquoi le grand nombre s’est-il mis au diapason des médias qui pontifient et des élites qui radotent? Comment a-t-on converti tant de propos à la monnaie unique de l’’éthique? Pourquoi est-on désarmé face à une incivilité grandissante qui bafoue l’esprit public? Pourquoi, en dépit du désarroi ambiant et du désastre qui s’annonce, la société dans son ensemble, persistant dans son délire, revendique-t-elle en quelque sorte le droit de prospérer tout en attentant à ses propres jours?
Georges Sebbag répond à ces questions alarmantes en les rapportant à deux réalités étroitement liées et passées jusque-là inaperçues — le chambardement démographique des âges et le naufrage du sens commun.
LA LIGNE CONTRAINTE
Avec gravité et humour une femme se livre, au passé, au présent, et jusque dans sa mort dont elle est à la fois partie prenante et spectatrice, à l’exercice introspectif, et parfois même jubilatoire, du voyeur en confrontation à d’autres lui-même en certains états de sa vie.
LES HABITANTS DE LA LUNE
« Les Habitants de la lune » est un roman d'urbanisme avec deux débuts possibles, selon que l'on pense que l'on va vers la ville ou que l'on vient de la ville, chacun pouvant être la fin de l'autre.
L'IRREPRÉSENTABLE
« Confrontée à l'arbitraire de l'interprétation, la compréhension est une mise en abyme de la représentation. Tel un présupposé de la richesse des intentionnalité et de la mouvance des affects, ce qui n'est pas représentable sert de garde-fou contre le pouvoir de modèle d'interprétation. Mais la volonté d'interprétation l'emporte parce que, selon Schopenhauer, la représentation nous délivre de l'ennui. Le spectacle du monde et de la vie nous distrait en nous entrainant dans le vertige de l'interprétation. Croire qu'il est toujours possible de se représenter les sentiments que nous éprouvons, les passions que nous vivons, est une manière de conjurer l'angoisse existentielle que le fait d'être agi ou de pâtir provoque ». H.-P. J
PAS PAR MOI (IL NE PASSERA PAS)
« Je me sens cerné de tous côtés par des brins de fil, la plupart insignifiants, mais dont la quantité et l'organisation idéalement chaotiques me maintiennent au niveau du sol, Gulliver assailli de Lilliputiens .Ces brins, quels sont-ils ? Ce sont ce que l'on appelle les petits désagréments quotidiens. C'est le propriétaire qui... C'est l'huissier qui... C'est l'employeur qui... C'est le subalterne, C'est le regard du militaire, c'est l'automobiliste, c'est le policier, c'est le médecin... Pris séparément, il n'y a pas de quoi fouetter un chat. Mais ces brins s'enchevêtrent sans cesse, se recoupent, renvoient l'un sur l'autre. Le caractère non-déterministe de leurs enchainements ne rend que plus efficace leur propre tension... » S. B.
FRAGMENTS SUR LA VIE MUTILÉE
Jean-Michel Palmier est décédé des suites d'un cancer le vingt juillet 1998 à l'âge de cinquante-trois ans. Dans cet ouvrage il lègue des fragments bouleversants de sa vie « mutilée », l'auteur parcourt l'ultime chemin de son dernier exil.
L'HÔPITAL DU LIVRE
- Texte de Hubert Tonka, Photographies de Michel Denancé et George Fessy -
Simultanément à la Bibliothèque de France François-Mitterrand, à Paris, Dominique Perrault a construit ce qui, en quelque sorte, constitue ses réserves, L’hôpital du livre centre technique du livre à Marne-la-Vallée. « Notre fin de siècle a la pâtisserie triste et le style international avachi. La nullité semble être la manifestation la plus symptomatique du reniement, de la honte et du regret. Notre époque n’apprécie pas l’art qui ne grave pas sa griffe dans une épaisse pâte vernie ou ne s’orne de pacotilles, de gestes superfétatoires où le pastiche l’emporte sur l’esprit. Faut-il agiter le clinquant ou multiplier les ornements afin d’attirer l’attention ? L’architecture du Centre technique du Livre tient dans un paradoxe : L’“identitisme différentiel”. Ces bâtiments ressemblent, pour un regard hâtif, à tous ceux qui les entourent à ceci près : les autres prétendent “faire Architecture” alors que celui-ci ne dit rien d’autre que ce qu’il est : un bâtiment s’effaçant dans une particularité qui est justement celle de l’architecture contemporaine : dans le domaine artistique propre à l’architecture le paradoxe de la présence-absence n’est pas manipulable sans un sérieux savoir artistique... » H. T.
LA MACHINATION DES MOEURS
« L’ordre virtuel s’élabore sur le banal élevé à la énième puissance de l’image. Quoi de plus ordinaire qu’un souverain batifolant ici ou là, trompant son monde avec sincérité, se repentant sur la scène publique avec conviction, louant son entourage et ses partisans ? Ce qui est nouveau, quand même, c’est que l’appréciation de la fonction d’autorité se ramène de plus en plus à ces questions subsidiaires. N’y avait-il rien d’autre derrière la puissance ou sommes-nous passés à un autre ordre ?... Le Monicagate est la version électronique du bavardage et du commérage élevée à un niveau quasi prodigieux. Il est presque fantastique en effet que le sexe d'un président vienne occuper l’écran médiatique, que la puissance phallique et politique se mêlent jusqu’à l’indistinction et viennent s’abîmer dans une histoire commune... » A. G.
LES RUINES DU FUTUR
– Réédition –
Un des premiers grands textes sur les bonheurs et les abîmes de l’informatique. Sans réelle mise en garde mais d’une parole toutefois prononcée, Yves Stourdzé nous avertit dès les premières pages que « nous nous promenons aujourd’hui dans les ruines de notre avenir »... « où l’on rencontre d’un côté la miniaturisation, le microprocesseur et les manipulateurs enzymatiques ; de l’autre la navette spatiale, la bombe à neutrons... où l’on voit que, dans l’entre-deux, nous circulons à tâtons, pendant que s’élaborent des mémoires collectives, banques et bases de données, et que s’établissent les réseaux interconnectés dont les terminaux, comme autant de bouches avides, renouent avec le modèle ancien des voracités et des appétits... où l’on distingue partout des groupes qui s’agglomèrent, puis renouent avec un passé insolite, faisant leurs des passions transversales, des spécificités passagères et des stocks de signes orphelins... où l’on saisit que reproduire signifie désormais créer directement des ruines, des débris, des éclats et des nuisances... où l’on constate alors le mixage des temporalités, l’instabilité des corps... et où l’on se met à parcourir l’archéologie comme un thème de science-fiction...(Y.S.) »
MAI C'EST TROP TARD MÊME QUAND L'AIR SOUFFLE…
« La réverbération de Mai sur l’eau de l’oubli, le miroitement d’une dizaine d’années sur la boue aqueuse de la légitimation, l’insolation d’un anniversaire sur un sable mazouté m’ont fait échouer sur le rivage de ma pensée ? Naufragé, j’erre sur la grève où l’air fouette, en collectant les morceaux de mon embarcation ; si avec certain je me bâtis une frêle cabine, avec d’autres je me chauffe ; avec les miettes je remplis ma besace car la route sera longue, pas de nourriture, je cueillerai. Les miettes, juste l’écriture, celle qui n’a d’autre justification que son fil qui se noue à en former des mots, et des mots s’élève une ballade. ¶ Mai, ni prétexte ni raison. ¶ Pas de théorie. Un défi, un pari. » (1978) T.